"Jean de Fleurette"
Pour Mil Et Unes
Il est de belles histoires qu’on aime révéler et de ma main fébrile, inexperte, mal habile, je vais du mieux que je peux, tenter de la conter !
Il était une fois, j’avais quelques printemps, un homme simple mais tellement émouvant qu’il emporta nos cœurs et marqua nos esprits, devenant une légende, un être hors du commun ! Je n’ai jamais su son vrai son nom, ni même d’où il venait, si il était marié, s’il avait des enfants … Je me souviens seulement qu’il habitait à la sortie du village, non loin de la rivière, dans une jolie maison avec des volets bleus, faîte toute en pierre de taille.
Pour tous les gens du village, il était une personnalité locale incontournable, attachante et tous l’avaient surnommé amicalement « Jean de Fleurette ». Indissociable de sa vieille jument Pâquerette, Jean coiffé d’une casquette, muni de son tambour, sillonnait dans son bel uniforme gris bleuté, les routes sinueuses de la campagne Faouëtaise ! Confortablement installé dans son char à banc qu’il agrémentait de fleurs, comme tous les jeudis et dimanches, il se dirigeait vers la place du marché. Une fois arrivé il se positionnait devant les Halles-monument historique du XVI siècle, impressionnant de beauté et d’équilibre, classé au patrimoine des monuments historiques – Il y attelait son cheval puis se positionnait au milieu de l’esplanade !
Dès le premier battement sec de son tambour, suivi de roulements plus insistants afin d’alerter tout le voisinage, petits et grands s’agglutinaient autour de lui, suspendus à ce qu’il allait dire ! Jean, dans une sorte de rituel très cérémonial, marquait un temps d’arrêt qu’il enjolivait d’un sourire puis sortait précautionneusement de sa poche le manuscrit préparé la veille. Comme chaque fois, Il se raclait la gorge afin que sa voix soit limpide. « Avis à la population » lançait–il alors dans un timbre chantonnant marquant ainsi le début des annonces ! Au sein de ce moment chaleureux et convivial où tous se retrouvaient, chacun était attentif, écoutait avec intérêt les nouvelles du Pays et les évènements qui ponctuaient la vie du village.
Mais « Jean de Fleurette » n’était pas qu’un simple crieur municipal, il était bien plus que cela ! C’était un poète, un homme généreux qui, dans une gratuité absolue, donnait sans jamais décompter. Dans sa carriole, sur les traces du Roi Morvan et de la belle Marion la « Robin des bois » bretonne, il transportait du bonheur, illuminant la vie de chacun, d’une chanson, d’une parole, d’un bouquet de violettes fraîchement coupées le matin dans la rosée de son jardin ! il n’avait pas d’âge, pas d’époque et traversait le temps, effleurant d’une caresse la nature, les oiseaux, sa jument Pâquerette et tous ceux qu’il croisait !
Par un matin d’automne, il y a de ça maintenant bien longtemps, sur la place du marché, le tambour s’est éteint et Jean s’en est allé pour rejoindre Murman ou peut être les anges ! Pâquerette l’a suivi ! Les années ont passées et sa tombe est fleurie quelque soit la saison ! Aucun des villageois n’a voulu l’oublier, initiant leurs enfants et leurs petits enfants à cueillir dans les champs pour leur « jean de Fleurette », des bouquets de chansons, des sourires, des violettes, de l’herbe pour Pâquerette …